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Maxime n’aime pas la cuisine

Maxime n’aime pas la cuisine

Pour la majorité des gens, la nourriture est intimement liée au plaisir et aux émotions. Pas pour Maxime Gervais. L’humoriste est l’un de ceux qui ne ressentent aucune passion pour les aliments. On lui a lancé un défi à la hauteur de ses ambitions culinaires : concocter un plat simple et le savourer au lieu de l’ingérer sur le pilote automatique. En sera-t-il vraiment capable?

Je vois des sourcils relevés chaque fois que j’en parle. On me regarde alors comme si je débarquais d’une autre planète. Je rassure les gens : je vais bien! C’est juste que je n’éprouve pas particulièrement de jouissance en lien avec la nourriture, aussi délicieuse soit-elle.

Chers foodies, voici le récit d’un homme pour qui manger n’est pas synonyme de plaisir.

Vous êtes toujours là? Bien! Je vais donc y aller de certaines précisions importantes sur ma terrible condition. Soyez rassurés, je sais reconnaître les qualités d’un bon repas, surtout quand celui-ci est généreusement gratiné d’un fromage fondant parfaitement doré. Voyez-vous, ce qui m’embête de la messe du repas, c’est son côté éphémère. C’est la routine éternelle de la faim à combler. C’est le besoin immuable de rassasier la machine à digestion que je suis.

Manquer de gaz

J’ai beau essayer, je n’arrive pas à trouver le bonheur dans un geste qui m’accorde environ quatre heures de liberté avant que mon estomac ne refasse des siennes. Je ne peux m’empêcher de me sentir comme une voiture qui se vide inexorablement de son essence, kilomètre après kilomètre. Pour répondre à la question : s’il existait une pilule pour remplacer un repas, oui, je la prendrais.

Pour certains, cuisiner est l’accomplissement d’une toile vivante. Une danse menant à l’extase des sens les plus intimes. Un spectacle où la chimie culinaire se marie miraculeusement à l’expérimentation artistique. La cuisine devient un cirque, où ils jonglent avec ces mots que je ne connais pas : endives, moussaka, tartiflette.

Pour moi, cuisiner un repas ressemble tristement à une équation mathématique sur laquelle je dois cocher les apports nutritifs des aliments qui le composent. Parce que oui, je fais l’effort de bien me nourrir. Je respecte les règles du jeu de la nutrition. J’aime être en bonne santé!

C’est le moment du défi!

Quand on m’a approché pour écrire un texte pour Recettes d’ici, j’ai éclaté de rire! À ma grande surprise, on m’a lancé un défi : trouver mon plaisir dans la cuisine.

Le jeu est simple : je dois choisir une recette (pour débutants) et tenter d’apprécier le moment, de sa concoction à sa dégustation. La stratégie, ici, sera de prendre mon temps.

J’ai décidé de m’y lancer comme si j’allais prendre un bon bain chaud. J’ai laissé mon téléphone dans une autre pièce pour vivre le moment et ne pas me laisser distraire par la moindre notification.

C’est une belle journée chaude d’automne. Sur mon tourne-disque, j’abaisse doucement l’aiguille dans les sillons d’un vieil album folk québécois. Déjà, le décor sonore me relaxe et j’attaque ma recette avec une légèreté dans l’âme.

Ma recette est simple : une soupe crémeuse aux légumes rôtisqui me rappelle immédiatement celle que ma grand-maman avait l’habitude de cuisiner.

Chers foodies, je n’ai jamais écrit ce genre de texte, mais j’imagine que ce serait un bon moment pour dévoiler les ingrédients, n’est-ce pas?

  • 2 c. à soupe de beurre salé, en petits morceaux
  • 1 oignon, coupé grossièrement
  • 2 branches de céleri, tranchées
  • 2 grosses carottes, tranchées
  • 1⁄4 de rutabaga, coupé en dés
  • 2 tasses de choux de Bruxelles, coupés en quartiers
  • Sel et poivre du moulin
  • 3 c. à soupe de farine
  • 3 tasses de bouillon de bœuf ou de légumes
  • 1 tasse de crème 10 %
  • 19 oz de tomates en dés en conserve
  • 2 c. à soupe de ciboulette fraîche, hachée

*Il est à noter qu’à 37 ans, je n’avais aucune idée de ce qu’était un rutabaga et ma surprise fut totale en découvrant qu’il s’agit d’un navet. On en apprend tous les jours!

Transe culinaire

Les yeux bien gonflés par les larmes durant la coupe de l’oignon, je souris en me disant que c’est quand même intense cette réaction : le légume qui fait pleurer quand on le coupe. C’est particulier. J’haïs pas ça! Je décide de vivre pleinement le moment. Serais-je en train de glisser dans la pleine conscience grâce à ce bulbe?

Tandis que je tranche mon céleri et mes carottes, je me rends compte que je me suis complètement perdu dans mes pensées. Je fais la connaissance du rutabaga en prenant conscience de sa texture, de son odeur, de sa personnalité. Je me rends compte que je savoure rarement ces petits moments de solitude. Il n’y a pas grand-chose de plus réconfortant que de couper de généreux cubes de beurre pour ensuite les voir fondre tranquillement dans le chaudron. Par contre, le mérite de toute la magie revient assurément à la crème 10 %, lorsqu’elle se mélange aux légumes et que les tomates lui donnent sa couleur rosée.

Le moment de grâce

Je change le vinyle de côté tandis que je laisse cuire pendant cinq minutes. Je m’installe sur mon balcon arrière. Je prends le temps de regarder la ruelle. Les arbres sont beaux. Le soleil est bon. Le fumet de ma soupe m’arrive par la porte restée ouverte et je commence à comprendre ce petit plaisir dont je me prive trop souvent. Coco, le beau gros chat de la ruelle, vient s’asseoir sur mes jambes. Il est lourd et tout chaud. De son côté, le disque folk se termine en me chantant que les journées passent trop vite. Ça y est, j’ai un moment de grâce. Je sens mes yeux qui s’humidifient d’une simple larme que les oignons ne sauraient justifier.

Je suis finalement sorti de ma transe par la sonnerie de la minuterie. Je me sers un bon gros bol de cette soupe fumante et la voix de mon amoureuse me revient en tête pour me rappeler qu’il n’y a rien de mieux que d’ajouter du cheddar fort sur une soupe. Serais-je en train d’improviser dans une recette? Soyons fous! Je m’exécute et retourne sur le balcon pour y déguster ma création culinaire. Coco, que j’ai dérangé en me levant, me regarde admirer mon bol. Je plonge ma cuillère dans le bouillon pour essayer d’y créer le parfait équilibre des ingrédients. C’est bon. Délicieux, même. Je mange le reste avec fierté tandis que Coco tente de grimper sur mes jambes pour y terminer sa sieste.

Je l’admets, ce moment m’a fait du bien. Je n’étais pas en train de combler un besoin élémentaire. J’étais en train de prendre un moment avec moi-même. Chers foodies, ce défi qu’on m’a proposé ne fait pas de moi un cuisinier chevronné (j’ignore toujours ce qu’est une moussaka), mais je crois que j’ai compris le plaisir de jouer avec les aliments et les chaudrons. Sans aucun doute, je vais à nouveau égayer mes journées d’un de ces moments de grâce que je vous souhaite aussi.

Pour découvrir toutes nos recettes de soupes et potages : Soupes et potages

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