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Pour ou contre la poêle en fonte?

Pour ou contre la poêle en fonte?

Par Vas-tu finir ton assiette

Ahhhhhhhhh, la poêle en fonte. Les cuisinomanes ne jurent que par elle. Les gens normaux ont vaguement l’impression qu’on essaie de les embarquer dans une secte.

Paraît que c’est aussi compliqué à entretenir qu’un chiot, qu’il ne faut pas mettre de savon à vaisselle, qu’il faut l’assaisonner pour la rendre antiadhésive (du cumin, ça va?), qu’il ne faut pas la nourrir passé minuit, mais il paraît aussi que tout ce qu’on y cuit est meilleur. Le débat est lourd… comme une poêle en fonte sur un orteil.

C’est pourquoi Recettes d’ici a invité deux expert.es de la quincaillerie de cuisine pour débattre de la question. Dans le camp des jamais-sans-ma-poêle, Mathieu Charlebois. Dans celui des jamais-tout-ce-trouble, Caroline Décoste.

Mettez le rond à high!

Mathieu, pour : une histoire d’amour

Si je quitte ma demeure pour plus de 48 heures, ma poêle en fonte m’accompagne. Oh, certes, elle pèse une tonne et elle prend de la place dans mes bagages, mais en échange d’un léger lumbago et de mettre les mêmes bobettes trois jours d’affilée, j’ai droit aux meilleurs repas possibles. Que ce soit du steak, des légumes grillés ou des crêpes soufflées.

« Ne soyez pas surpris.es si vous invitez Mathieu dans un chalet et qu’il dort nu en cuillère avec sa précieuse poêle en fonte. » – Caroline

La poêle en fonte demande à être apprivoisée. Il faut comprendre comment la chaleur se comporte sur sa surface, jusqu’à ne faire qu’un avec elle. Sans coller au fond, là! Parce que quand on sait s’y prendre, RIEN ne colle à la fonte. Au bout de tous ces efforts vient la plus grande récompense : l’impression d’être meilleur.e que tout le monde. (Et une pas pire croûte sur les viandes.)

Caroline, contre : j’ai pas l’énergie pour un troisième enfant

Écoute, Mathieu, je comprends que tu es dans une relation fusionnelle avec un ustensile de cuisine, mais comme j’ai deux enfants en bas âge, j’ai zéro envie d’avoir à m’occuper d’un troisième qui me fera même pas de bricolage en macaronis pour compenser.

Ton poêlon, faut le laver à l’eau-pas-de-savon, le rincer en lui chantant une berceuse, le sécher (y connaît pas ça, « l’air libre sur le bord du comptoir », lui?), le huiler comme si y’allait au Beach Club, avec un massage californien pour le relaxer… P’tit jésus de plâtre de saint-crème que c’est d’la job pour une poêle!

«Écoute pas la méchante madame, poêle en fonte. Chhhhhhut. Écoute-la pas.» – Mathieu, berçant doucement sa poêle

Mathieu, pour : une histoire étrangement intense

Trop fragile? L’équivalent culinaire d’un bébé qu’il faut chouchouter en faisant attention à la fontanelle? Ben non! Même que le vrai plaisir de la fonte poêlée commence quand tu comprends que tu peux maltraiter ta précieuse poêle.

Pendant que le reste du monde se donne le cancer du téflon à cuisiner à médium dans d’ennuyantes poêles antiadhésives, moi, je m’amuse. Je garroche Fontina (c’est le petit nom de ma poêle) directement dans le feu de camp pour griller des champignons comme mes ancêtres fontalopithèques.

Elle n’est pas fragile du tout, Fontina. Quand je lui gratte sans ménagement les parois avec un couteau, en cuisinant un brie sucré-salé, elle ne se plaint même pas. Même qu’elle ronronne!

«OK, là, ça s’en vient bizarre, ton affaire.» – Caro, qui recule lentement en maintenant le contact visuel

La poêle en fonte, c’est la liberté. La succulente et savoureuse liberté.

Caroline, contre : la seule fonte que j’aime, c’est Times New Roman

Tsé, cher (dis-je en sortant mon bel accent du Swaguenay), c’est pas si essentiel que ça dans une cuisine, se donner de la job de même. Liberté, libarté, moi j’aime ça être libre de pas chouchouter un cossin plus que mon propre corps #selfcare. En plus, tout ce que ta belle poêle peut faire, je peux le faire sans elle!

Le beau pain dans une poêle qui looke sur Instagram? J’ai une recette pour le faire plus vite, en me forçant moins, avec du yogourt pour rendre ça moelleux, dans une cocotte qui, elle, ne fait pas de réaction allergique au savon et est capable de chécher cheule chul bord du comptoir comme tout le reste de ma vaisselle.

Les armoires de cuisine du Québec sont remplies d’affaires qui ont servi trois fois pour être ensuite oubliées quand on s’est collectivement rendus compte de comment c’était de la job à torcher pour rien : un spiraleur, une patente pour faire du sous-vide, le truc que tu mets ta pomme dessus et que ça la fait tourner en épluchant... Maintenant, une poêle en fonte.

Le verdict

[Réuni.es autour d’un sac de guimauves et d’un feu de camp dans un chalet, où Mathieu a bien entendu amené Fontina, les deux lurons tentent de trouver le milieu du diagramme de Venn de leur amitié secouée par ce désaccord culinaire.]

Mathieu : Admets au moins que si tu tombes face à face avec un voleur, cette nuit, la poêle en fonte et ses 25 livres, c’est efficace.

Caroline : Si des brigands rentrent dans le chalet, je vais leur pointer ta poêle en fonte pour qu’ils partent avec!

Mathieu : Je peux même pas essayer de te convaincre en te cuisinant quelque chose?

Caroline : Bon, OK. Mais juste si tu la torches après.

Mathieu : Vendu.

Caroline : Pis que tu m’fasse une omelette aux asperges pour bruncher.

Qui sont Caroline et Mathieu?

Quand iels ne se battent pas virtuellement à coups de mitaines de four, ces lurons aussi gais et moelleux que le pain co-écrivent le blogue humoristico-alimentaire Vas-tu finir ton assiette?. Quand, à l’épicerie, vous vous demandez « Mais qui peut bien acheter cette cochonnerie? », la réponse est invariablement : « Caroline et Mathieu ». Iels y goûtent, iels en rient.

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